La méthode pour rater un « carpe diem »

La méthode pour rater un « Carpe diem »

Non, ce n’est pas UNE « Carpe Diem », non ce n’est pas une sorte de poisson des rivières du coin.

Un des grands poèmes d’Horace nous dit de cueillir le jour présent sans nous soucier du lendemain. C’est ainsi qu’il est possible de vivre, non pas dans l’insouciance, mais dans le bonheur du moment présent. Je sais que je ne reviendrais probablement jamais dans cette contrée hostile du Yukon, je sais aussi que chaque seconde de ma vie est unique, précieuse et qu’elle mérite d’être vécue pleinement. En somme, ne prenez pas trop la vie au sérieux, vous n’en sortirez pas vivant ! Il est facile d’oublier que le monde est magnifique en se concentrant sur les mauvais enjeux, les mauvaises pensées. Voilà ce que j’ai vécu aujourd’hui.

J’ai quitté la pourvoirie avec un objectif qui n’était pas le bon. Après avoir vu les cartes topographiques et compris que j’avais plus de deux cents kilomètres de navigation devant moi, j’ai calculé. À la vitesse où je descends actuellement la rivière, j’arriverai au fleuve Mackenzie dans une vingtaine de jours. Et de là, je ne suis pas encore arrivé à la communauté autochtone. Un homme pressé en survie est un homme mort ! J’avais oublié cette phrase pleine de sagesse pour essayer de manger des kilomètres et des kilomètres de descente. Toute la journée, j’ai tenté de calculer ma vitesse de descente, la force du courant, j’ai spéculé, je me suis demandé comment utiliser le vent, comment faire pour aller plus vite, comment mieux performer dans ma descente et au bout de la journée, rompu de fatigue, je me suis rendu compte que je n’avais ressenti aucun plaisir, aucun bonheur à faire la descente. Vivre dans le passé crée de la nostalgie, vivre dans le futur provoque de l’angoisse. J’ai perdu la chance de vivre le moment présent à cause de l’envie de retrouver mon passé, ma maison, ma famille.

Prisonnier de mes calculs afin de prévoir l’avenir, j’ai échappé le véritable sens de ma quête au Yukon. Je ne suis pas dans une compétition, je n’ai pas de médaille à gagner, pas de commanditaires à séduire par ma rapidité. Je suis ici pour survivre, pour prendre le temps de bien faire les choses. Je ne dois pas risquer ma vie, ni risquer une blessure. La performance ici n’a pas sa place.

Pour tout vous dire, je calculais aussi ma quantité de barres tendres en fonction du nombre de jours que j’estimais devoir faire. Deux par jour et ça y était ! Plus de porc-épic à manger pour le reste de mon voyage. Mais la vie ne se calcule pas ainsi et je sais que d’autres surprises, des bonnes et des mauvaises, m’attendent dans le détour. Si je dois avoir faim pour vivre pleinement cette aventure, eh bien, j’aurai faim. J’ai choisi de réaliser cette expédition, personne ne m’y a forcé, je connaissais les souffrances et les risques associés à la survie.

Je vais travailler mon attitude, mettre l’accent au bon endroit.

La chance est de mon côté, car je viens de mettre la main sur un fantastique bout de bois d’épinette pour me faire une pagaie plus légère, plus solide et plus longue aussi. Cet instrument de navigation me servira à mieux contrôler mes déplacements sur l’eau.

Plus j’y pense, plus je crois que même si je meurs de faim, je ne chasserai plus de porc-épic. L’énergie perdue dans la chasse et dans la préparation ne vaut pas les calories que je récupère en avalant sa chair. Cependant, la pêche me tente énormément et je compte bien trouver un bon endroit pour jeter ma ligne à l’eau dans les prochains jours.

Et puis, je commence à m’acclimater à ma nouvelle vie dans ces paysages. Les lieux de mes campements sont mieux choisis et je trouve du meilleur bois, bien sec, ce qui intensifie la chaleur de mes feux de camp. Cela joue également sur la qualité de mon sommeil et je passe de meilleures nuits, sans grelotter.

Oui, un peu de pêche pour attraper une truite, une perchaude, une carpe peut-être… une « Carpe Diem » !

Fred en trois points : 

Moral :  8 sur 10
Physique :  8 sur 10
Ce qui lui manque : autre que ses proches, rien.

Capsule de Fred ayant servie à l’écriture de ce texte : 

Progression de Fred

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Bandeau conférence

26 réponses à “La méthode pour rater un « carpe diem »

Fantastique de pouvoir te suivre dans tes aventures, c’est très inspirant, cela fait réfléchir…. Ton p’tit bonheur, ton sens de l’organisation, tes astuces, ton courage, ta détermination, et ton enthousiasme sont des éléments indispensables à la réussite de cette belle et grande aventure alors garde précieusement tout ces trésors, ta route est belle et on est tous avec toi Fred!!!

Bonjour Fred, je vous suis à travers votre périple quotidiennement et je suis à écouter votre message en mangeant une pointe de pizza et tout d’un coup je me sens un peu bizarre a l’idée que vous vous battez pour avoir des calories….réflexion. Je vous admire et vous envois de belles pensées positives bien assise confortablement à l’abris des intempéries. Oups !! encore un sacré malaise. Sincèrement vous me faite réfléchir sur les petits bonheurs quotidiens qui nous passent souvent sous le nez sans que nous ayons pris le temps si précieux de graver au fond de nous, ces instants d’émotions purs. Je m’imagine vous couvrir d’une couverture bien chaude pour que vous puissiez vous endormir confortablement sous un ciel étoilés comme vous en avez jamais vue !! go go go Fred on vous accompagne.

Bonjour Frédéric,
Chaque article révèle de la sagesse, mais aussi un genre d’affirmation qui demanderait un peu de nuance, comme celle face au “rejet” de la chair de porc-épic, selon ce que j’ai saisi. Si la chair s’est perdue (mouches ayant trouvé un lieu de ponte ou parasites présents dans la viande), serait-ce pas qu’elle n’était pas cuite ou assez cuite ?
Si c’est bien cela, pourquoi ne pas dire alors… bon, je tenterai de capturer et manger du porc-épic seulement si je n’ai pas le choix, ce qui garde une option ouverte sur une viande apportant des protéines et assouvissant une faim qui minerait le moral… cette fois en accomplissant une cuisson complète ou en la faisant fumer. Mais la capture du poisson exigeant moins d’efforts devrait être privilégiée pour cette raison. Salut !

Bonjour Frédéric,

Ton aventure est passionnante et inspirante. Je suis constamment connecté sur ton blogue en attente de tes nouveaux textes, cartes et capsules. J’apprends beaucoup de tes expériences sur le terrain. J’ai particulièrement aimé cette article, plein de sagesse et d’expérience de vie.

Un gros merci à toute l’équipe qui te supporte et qui transmet tes informations vocales en de si beau texte. Je sais que c’est un travail colossale. Encore une fois MERCI!

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